La période des débuts de l’IRMC en 1992 a permis de réunir les gens autour de tables rondes et de présentations de recherches. C’était un moment très intéressant où, pour la première fois, nous étions confrontés à une action qui nous permettait des ouvertures sur des questions que nous n’avions pas la possibilité de traiter nous-mêmes. Les conférenciers invités, les échanges organisés avec des personnalités locales (Jalel Abdelkafi par exemple) montraient qu’on pouvait s’informer sans aller jusqu’à Paris. On était intéressé d’aller écouter des gens qui apportaient de nouvelles idées, de nouvelles orientations, de nouveaux messages. C’était un relais par rapport à nos bouquins.
Dans les années 2000, avec Pierre Robert Baduel, l’IRMC a ouvert le jeu aux échanges réguliers suite aux conférences, notamment sur les approches urbaines, thématique arrivée à l’IRMC un peu tard, et à laquelle j’ai participé avec le programme de Lamia Zaki. Et surtout, ces années ont développé une série de publications stimulantes. Cela s’est prolongé dans la période actuelle, avec une ouverture aux individus. Si le thème dominant de l’IRMC des années 1990 était le politique, celui des années 2000 était la multiplicité des productions intellectuelles, et celui de maintenant « les gens qui sont-ils ? D’où viennent-ils ? ». Tout cela était très lié aux personnalités des directeurs, chacun venant avec sa petite valise.
Ce que je retiens aussi, c’était les réunions longues du samedi de 9h30 à 14h. Elles réunissaient 12 étudiants et 3 seniors, et le but était de faire parler les doctorants confrontés à des spécialistes. Les échanges avaient des retombées intéressantes pour ceux qui préparaient des diplômes. Les gens venaient parler de leur travail, en présentaient les difficultés, et on déverrouillait les choses avec eux. Il y avait aussi des passerelles entre les gens qui venaient voir la documentation de mon centre (une bibliothèque de plus de 5 000 documents), et l’IRMC. Souvent ces personnes qui passaient me voir n’étaient pas suffisamment encadrées dans leurs universités.
Pour certains enseignants qui ont passé trois ans à l’IRMC cela a été une ressource fantastique, quand on voit les livres qu’ils ont conçus et dirigés. Mais cela ne s’adressait qu’aux universitaires. D’autres formules avec des professionnels comme moi n’auraient pas marché car on était dans une situation très serrée avec des plans de travail et des déplacements lourds pour répondre aux commandes de l’État, on n’aurait pas pu venir s’installer 15 jours à l’IRMC en laissant tomber notre boulot.
Donc ce choix qui s’est appuyé sur les enseignants universitaires était très bon car il leur a permis de renouer des relations et de sortir de bons livres. Mais il faut reconnaitre qu’à l’IRMC il n’y avait pas de place pour des gens comme moi, faux professionnel avec une moitié de chercheur, bien sûr on appréciait que quelqu’un vienne donner des exemples sur telle ou telle région, mais certains collègues semblaient se demander ce que je venais faire… Il a fallu que je sorte plusieurs publications pour entrer dans le « club », mais au début c’était difficile…
(Propos recueillis par Pierre-Noël Denieuil)
Publié en mai 2013 dans la Lettre de l’IRMC n°11
Morched CHABBI
est sociologue et urbaniste, directeur d’URBACONSULT.
Pour citer ce billet : Morched Chabbi, « Souvenirs de l’IRMC », Le Carnet de l’IRMC, 23 juillet 2013. [En ligne] http://irmc.hypotheses.org/1078